Comment conduire efficacement une entretien annuel d'évaluation ?

21/12/2016

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L'entretien annuel d'évaluation est un rendez-vous incontournable de la fin d'année entre le manager et ses collaborateurs pour évaluer les compétences professionnelles du collaborateur, identifier ses points forts et ceux à améliorer, fixer des objectifs pour l'année à venir. C'est en effet un moment privilégié de dialogue : il fait concorder au mieux l'intérêt de l'entreprise avec les aspirations du collaborateur.

Les principaux résultats attendus d'un entretien individuel d'évaluation sont les suivants :

  • permettre tout d'abord de suivre et maîtriser l'évolution des postes, des compétences et de l'organisation du travail ;

  • anticiper l'évolution professionnelle des collaborateurs en fonction de leurs aspirations ;

  • favoriser l'objectivité et la transparence dans l'appréciation des résultats ;

  • développer le dialogue et la communication entre les différents niveaux de la hiérarchie ;

  • responsabiliser chacun dans son rôle vis-à-vis de son poste de travail et des objectifs individuels et collectifs.

Au total, l'entretien individuel est un outil de gestion et de communication donnant au collaborateur un moyen d'évaluer sa vie professionnelle.

La plupart du temps nous pouvons réaliser cette évaluation seul. D'ailleurs, notre capacité à savoir mesurer les résultats de nos actions représente un des aspects qui montre notre expertise dans un domaine. Cependant, plusieurs situations peuvent gêner ou empêcher de réaliser cette évaluation individuelle à un niveau suffisant.

Notre vision personnelle de la performance

Nous définissons les niveaux de résultats d'une performance et son intérêt général d'une manière qui nous est propre. Prenons l'exemple d'un responsable pour qui tel collaborateur devrait traiter les affaires en donnant une priorité aux clients les plus fidèles. Cette notion de priorité tant qu'elle n'est pas précisée peut avoir beaucoup de sens pour le collaborateur. Il peut par exemple considérer que la performance « traiter les affaires » doit être réalisée coûte que coûte, sans cette idée de priorité, pour aider les collègues à se libérer pour d'autres actions ou parce que s'il ne le faisait pas, les collaborateurs le lui reprocheraient, etc. Par contre, pour son manager cette action a une autre envergure, par exemple permettre d'obtenir un quota de traitement d'affaires plus important ou de relancer les affaires en priorité sur les clients les plus profitables, etc.

C'est pour cela que nous avons besoin d'un avis extérieur qui nous permette d'intégrer d'autres raisons à exécuter telle performance et puisse élargir notre vision de celle-ci.

La présence de critères d'évaluation

Nous ne sommes pas tous capables de mesurer au même niveau nos performances. Par exemple, je peux considérer faire un nombre de fautes d'orthographe acceptable quand je rédige un texte, en gros 2 à 3 fautes par page rédigée. Or, cette mesure personnelle est largement insuffisante si elle ne se rapporte pas à un véritable critère. Celui-ci devrait me dire en quoi ma mesure est correcte, et pour cela m'apporter trois types d'information :

  • une information sur l'exactitude de la performance ;

  • une information de diagnostic sur ce qui est mal fait et conduit à cet écart ;

  • une information corrective pour savoir ce qu'il faut faire et comment le faire pour y remédier.

Parfois, nous ne disposons pas des documents, grilles ou tableaux, permettant de nous donner ces informations, d'où la nécessité qu'ils soient apportés par une personne : le manager.

Explication et méthode

Un entretien d'évaluation est d'abord un dialogue, ce qui implique l'échange entre deux individus. C'est pourquoi nous ne donnerons pas un modèle d'entretien d'évaluation qui soit absolu dans cette fiche, mais seulement quelques indications profitables à tous. Tout entretien annuel d'évaluation passe par trois grandes étapes incontournables :

  • la préparation de l'entretien ;

  • l'entretien lui-même ;

  • la conclusion.

La préparation

Il s'agit de préparer l'entretien autant du côté du manager que de celui de son collaborateur.

Tout d'abord, le manager fixe à son collaborateur un rendez-vous dans un délai suffisant afin que chacun puisse avoir le temps de préparer l'entretien. De plus il lui remet :

  • un exemplaire vierge d'un formulaire de préparation ;

  • le descriptif de son emploi.

En effet, le collaborateur doit être préparé pour « confronter » ses points de vue avec ceux de son manager, et négocier le plan d'actions de progrès ainsi que les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de ce plan d'actions.

Préparation du manager

L'entretien doit porter sur une année entière et non sur les quelques jours qui le précèdent. Il faut éviter de se focaliser sur une erreur commise par le collaborateur la semaine précédente. Le manager doit parvenir à définir l'essentiel de ce qu'il souhaite dire à son collaborateur et fonder son évaluation sur des faits précis.

Il est donc intéressant de préparer de courtes synthèses des entretiens informels qui ont eu lieu durant l'année écoulée. Ceci demande du temps et un certain investissement.

La préparation devra comporter les éléments suivants :

  • se remémorer les attendus du poste occupé ;

  • lister de ce que le collaborateur a réussi durant l'année et les qualités qu'il a mises en oeuvre pour y parvenir (objectifs définis et résultats obtenus). À ce titre, il lui faut revenir sur l'entretien de l'année précédente (s'il a eu lieu) pour revalider les points d'amélioration éventuels qui avaient été demandés ;

  • lister les sources de mécontentement et les situations qui posent problème aujourd'hui.

Préparation du collaborateur

Il est également important que le collaborateur prépare son entretien. Vous pouvez l'aider en lui remettant quelques jours avant l'entretien une liste de questions ouvertes qui serviront de base de discussion : ressenti sur le poste, difficultés rencontrées, souhaits d'évolution, etc. ou encore une grille d'évaluation dont une partie est consacrée au collaborateur (un modèle de grille vous est proposé dans cette fiche, rubrique « Outils à télécharger »).

Pour résumer, la démarche de préparation porte sur :

  • un constat : ce qui va et ce qui ne va pas à partir des résultats obtenus et des actions réalisées ;

  • un diagnostic qui répond à la question : « Qu'est-ce qui peut contribuer à ce que ... » ?

  • un plan d'actions : qu'est-ce que chacun va faire ?

L'entretien

Tout d'abord, il est important de ne pas reporter l'entretien et vous devez prendre les dispositions pour ne pas être dérangé pendant le déroulement de celui-ci (téléphone éteint, etc.).

Il n'existe pas de méthode type pour réaliser un entretien d'évaluation. En revanche, certaines façons de procéder permettent de faciliter la discussion entre le manager et son collaborateur.

Vous pouvez commencer l'entretien en évoquant la réalité quotidienne du poste tenu par votre collaborateur. Vous le laisserez ensuite s'exprimer sur le sujet. Vous pouvez l'aider en vous appuyant sur la fiche de poste et en analysant la réalité au regard de ce qui était initialement prévu. Vous pouvez ainsi voir si votre collaborateur a bien compris ce que l'entreprise attend de lui.

Il est ensuite primordial de faire un bilan du travail accompli.

Les succès

Pour analyser les compétences que le collaborateur a mises en oeuvre, vous pouvez lui demander d'évoquer ses réussites professionnelles accomplies et les raisons. En l'aidant à les déterminer, le manager permet au collaborateur de systématiser les réussites. Il est toujours plus simple pour le manager de faire progresser un collaborateur sur ses points forts que de combler ses lacunes.

Les échecs

Vous ne devez pas hésiter à dire ce qui ne va pas. La démarche doit rester constructive, car elle doit permettre au collaborateur de progresser. Il ne s'agit pas d'un entretien disciplinaire, ni de recadrage. Évoquer les difficultés permet de faire réfléchir le collaborateur à l'évolution de son poste et de ses fonctions.

Vous devez laisser votre collaborateur s'exprimer et ne pas imposer un discours à sens unique. Vous pourrez, ensuite, apporter des explications et des arguments face aux critiques émises par votre collaborateur.

Ensuite, vous devez être capable de synthétiser ce qui a été dit et de formuler les objectifs à atteindre (aussi bien en termes de performance, que de comportement, d'intégration à l'équipe, etc.). Il est préférable de se limiter à un ou deux axes d'amélioration par catégorie pour obtenir des résultats.

Vous devez également mettre en place, en face de chaque objectif, les moyens ou actions à prendre pour l'aider à les atteindre, comme par exemple de la formation, du tutorat par des collègues, de l'accompagnement par vous-même, etc.

Dans un dernier temps, l'entretien pourra porter sur le développement personnel et professionnel du collaborateur qui aura pour thèmes :

  • les souhaits du collaborateur en termes de formation dans le cadre de son compte personnel de formation (CPF) ;

  • l'évolution de poste ;

  • et éventuellement sa rémunération.

Nous attirons votre attention sur le fait qu'il est préférable de ne pas le faire. Si tel est le cas, le collaborateur ne pourra pas entrer dans un dialogue constructif et cherchera toujours à se justifier sur les critiques qui lui seront faites. Le mieux est donc de dissocier les deux, même si ce n'est pas facile. Le manager n'étant pas décisionnaire, il ne doit pas s'engager dans une discussion sur ce sujet. En revanche, les demandes du collaborateur pourront être entendues et mises en perspective au regard du bilan effectué et des objectifs fixés.

La conclusion

À l'aide de votre synthèse vous allez maintenant résumer les engagements réciproques évoqués durant l'entretien. Évitez la directivité, conduisez le collaborateur à s'investir, c'est-à-dire :

  • faire un premier résumé oralement : il est bon que ce soit le collaborateur qui le fasse. On peut l'aider par un jeu de questions : « Bon alors où en est-on ? Si on essayait de résumer ? » ;

  • objectifs à améliorer : ils doivent être précis, concrets, réalistes et avoir obtenu l'accord du collaborateur. Ces objectifs sont validés par le manager à un niveau ambitieux et réalisable ;

  • plan d'actions : les moyens mis en oeuvre pour aider à atteindre les objectifs et les plans d'actions sont reportés par écrit, de préférence par le collaborateur.

Enfin, l'entretien annuel d'évaluation sera signé par vous-même et par votre collaborateur.

Les résultats de cette évaluation doivent rester confidentiels. Les collaborateurs concernés peuvent demander à accéder aux résultats de leur évaluation.

Les erreurs à éviter

1. Penser qu'il n'y a pas de règles à la mise en place de l'entretien annuel d'évaluation

Droit ou obligation pour l'entreprise

Le Code du travail ne contient aucune disposition obligeant l'employeur à instaurer des entretiens d'évaluation dans son entreprise. Les juges reconnaissent toutefois à l'employeur le droit de pratiquer de telles évaluations, considérant que c'est un droit qui relève de son pouvoir de direction.

Toutefois, l'organisation de ces entretiens peut être rendue obligatoire en application d'une convention ou d'un accord collectif. Certains accords peuvent en effet définir des règles relatives à l'organisation ou au formalisme de l'entretien annuel d'évaluation. Il convient donc au préalable de s'y reporter.

Information des collaborateurs

Avant d'évaluer l'aptitude professionnelle de vos collaborateurs, vous devez les informer des techniques et des méthodes utilisées (C. trav., art. L. 1222-3). L'information préalable pourra intervenir sous une forme individuelle ou collective. Aussi, un simple affichage dans un lieu accessible à tous suffit.

Consultation des instances représentatives du personnel

Parce que les évaluations sont de nature à engendrer une pression psychologique entraînant des répercussions sur les conditions de travail des salariés, agir sur leur évolution de carrière et leur rémunération, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) doit être consulté avant leur mise en place.

Le défaut de consultation du CHSCT expose l'entreprise à se voir interdire la mise en oeuvre de la procédure d'évaluation.

Déclaration du dispositif à la CNIL

Si des données personnelles collectées au cours des entretiens sont enregistrées dans un fichier informatique, le dispositif d'entretien d'évaluation doit être déclaré à la CNIL.

Méthodes et techniques d'évaluation des collaborateurs

Les méthodes et techniques d'évaluation des salariés doivent être pertinentes au regard de la finalité poursuivie.

Si le dispositif doit permettre d'évaluer la qualité du travail accompli par le salarié, il doit l'être sur la base de critères objectifs et vérifiables et connus du salarié.

Aussi, des méthodes telles que l'astrologie ou la numérologie doivent être écartées.

Ces méthodes ne doivent porter que sur les qualités professionnelles du salarié et non sur sa vie privée.

Enfin, les résultats de cette évaluation doivent rester confidentiels. L'employeur a interdiction de communiquer à des tiers des renseignements concernant le salarié et recueillis au cours des procédures d'évaluation. Mais cette confidentialité n'est opposable qu'aux tiers. Les salariés concernés peuvent demander à accéder aux résultats de leur évaluation.

Droits et obligations du collaborateur lors de l'entretien d'évaluation

En raison du caractère impératif de l'entretien annuel d'évaluation, le collaborateur ne peut pas, sauf abus de droit du manager, refuser de s'y soumettre. Son refus peut être sanctionné, il peut même justifier un licenciement pour faute grave.

Dès lors que les informations demandées par le manager au collaborateur ont un lien direct et nécessaire avec l'évaluation de ses aptitudes, le collaborateur est tenu d'y répondre de bonne foi.

À la différence d'un entretien préalable à une sanction disciplinaire, le collaborateur ne peut pas exiger d'être assisté par un représentant du personnel lors de son entretien d'évaluation.

Le manager est également tenu à une obligation de loyauté. Les informations qu'il demande au salarié doivent avoir un lien direct et nécessaire avec l'évaluation des aptitudes de celui-ci.

Déléguer la réalisation d'un entretien d'évaluation

Il est impératif que l'entretien d'évaluation soit mené par le manager direct et non le supérieur hiérarchique du niveau au-dessus afin de ne pas le déresponsabiliser et le décrédibiliser devant son équipe. C'est le manager direct qui connaît le mieux ses collaborateurs.

Évaluer sur des critères flous ou intangibles

Les critères d'évaluation des collaborateurs doivent être pertinents au regard de la finalité poursuivie. L'évaluation de la qualité du travail accompli par le collaborateur doit être réalisée sur la base de critères objectifs et vérifiables et, de plus, connus du collaborateur.

Par conséquent, elles ne doivent porter que sur des qualités intangibles comme « être plus courageux », ou « s'investir plus », ou encore moins se référer à la vie privée. De même, vous ne devez pas prendre en compte des critères tels que notamment l'âge, la santé, l'origine, l'appartenance syndicale, sous peine d'être condamné pour discrimination ni, évidemment, pratiquer de harcèlement moral.

Elles doivent aussi respecter la dignité des personnes et s'effectuer dans le respect du principe de loyauté.

2. Ne pas reproduire ce qui a été échangé

La rédaction de l'entretien annuel d'évaluation doit faire l'objet d'une attention particulière dans la mesure où le compte rendu reflète la réalité des échanges produits lors de l'entretien : si une divergence de position est apparue entre vous et votre collaborateur, n'hésitez pas à la mentionner, de même, si vous estimez que ses capacités professionnelles sont insuffisantes au regard du poste qu'il occupe.

Si vous indiquez des appréciations positives alors que ce n'est pas le cas, simplement pour éviter un conflit avec votre collaborateur, vous aurez du mal par la suite à justifier que ce dernier ne convenait pas pour le poste.

En règle générale donc, vous remettez au collaborateur un compte-rendu de l'entretien que vous lui demandez de signer. Le refus du collaborateur de signer le bilan de l'entretien en signe de désaccord avec son contenu n'a aucune incidence sur la validité de l'entretien qui s'est déroulé. Toutefois, cela amoindrit la portée du compte-rendu, qui perdra de sa force en cas de litige devant les tribunaux, les deux parties n'étant pas d'accord sur le bilan de l'année écoulée.

Le collaborateur peut aussi le signer tout en faisant part, dans la partie prévue à cet effet, de ses commentaires sur les critiques faites à son encontre. Il peut ainsi préciser qu'il n'a pas eu les moyens nécessaires à ses missions.

Le collaborateur peut également demander copie du document comportant des données d'évaluation, ainsi que la signification des codes et valeurs qui lui sont appliqués.

Pour la CNIL, « Les salariés ont le droit de connaître leur classement annuel et leur potentiel, dans la mesure où ces éléments ont été pris en compte pour décider une augmentation de salaire, une promotion ou une affectation ».

Mais attention, une fois que l'entretien s'est déroulé et que vous avez rédigé un compte-rendu sur cette base, vous ne pouvez plus modifier le document à l'issue de l'entretien au désavantage du collaborateur. Les juges ont vu un indice de harcèlement moral dans un cas où un responsable hiérarchique avait modifié le compte-rendu de l'entretien annuel d'évaluation après la tenue de ce dernier et alors que le collaborateur avait refusé de le signer.

L'entretien d'évaluation permet d'apprécier les qualités professionnelles d'un collaborateur au moment où il est réalisé. Aussi peut-il avoir des incidences en matière de rémunération, de déroulement de carrière et de formation.

Une appréciation négative du travail du collaborateur peut constituer un élément à charge que vous pouvez utiliser contre lui. Ainsi vous pouvez vous fonder sur les résultats d'une procédure d'évaluation pour justifier une différence de classification et de rémunération.

Si l'appréciation du travail du collaborateur est positive, le collaborateur pourra aussi vous opposer les comptes rendus de ses entretiens annuels pour réclamer par exemple une revalorisation de salaire ou contester le motif de son licenciement dans le cas où une incompétence professionnelle lui serait reprochée.

3. Confondre entretien annuel d'évaluation et entretien professionnel

L'entretien professionnel est obligatoire pour tout collaborateur quelle que soit la taille de l'entreprise, il crée un droit pour tous à la formation ou à l'évolution professionnelle.

Il se distingue de l'entretien d'évaluation qui a pour vocation principale d'apprécier les résultats du collaborateur de la période écoulée et de fixer les objectifs et axes d'amélioration pour la période suivante.


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